Le Premier ministre Moctar Ouane a-t-il les moyens de sa politique pour ambitionner autant d’actions dans son plan gouvernemental pour les treize mois restants à la Transition ? La Transition envisage-t-elle une prolongation
Au cours de la présentation de son plan d’action gouvernementale de la transition, le vendredi dernier devant le Conseil national de transition, réuni en séance plénière, le Premier ministre Moctar Ouane a égrené de nombreuses « belles priorités » au goût de déjà entendu. Surtout que ce programme semble trop ambitieux pour être exécuté dans le peu de temps qui reste à la Transition.
En effet, comment Moctar Ouane et son équipe peuvent-ils concrétiser les « 6 axes déclinés en 23 objectifs, adossés à 275 actions à évaluer en 291 indicateurs » de son plan d’actions gouvernemental en cette période de grande tension de trésorerie ? Comment croire en la faisabilité de ces bonnes intentions quand le gouvernement ne jouit même de l’accompagnement sociopolitique souhaitable ? Comment convaincre les conseillers du CNT de la pertinence d’autant d’actions quand le défi sécuritaire et d’autres préoccupations du front social sont et demeurent une grosse épine dans le pied des dirigeants de la Transition ?
L’on se pose des questions sur la capacité de la gouvernance à traduire en actes concrets les annonces que le Premier ministre vient de faire, comme du reste certains de ses prédécesseurs en un temps plus favorable. Par exemple, Moctar Ouane promet déjà dans le premier axe, renforcement de la sécurité, la priorité N. 3 portant sur « la dissolution effective de toutes les milices ». Le chef du gouvernement semble même lier l’évolution des autres actions prioritaires à celle priorité. Or, il est de notoriété que d’autres Premiers ministres, comme Soumeylou Boubèye Maïga, Dr Boubou Cissé ont, chacun, vainement tympanisé les Maliens sur cette urgence. Ce que ces deux locataires de la primature n’ont pas pu faire durant leurs baux respectifs plus longs que les 13 mois restants de la Transition, comment Moctar Ouane pourra-t-il le faire ? Le Premier ministre de Transition est-il dans la langue de bois ou dans le faire semblant dont parlait encore récemment l’imam Mahmoud Dicko ?
En outre, comment ne pas sourire face à l’engagement du Premier ministre de Transition de procéder à « une refonte du système éducatif », d’« élaborer et d’adopter une nouvelle Constitution », d’« organiser une conférence sociale et engager le débat sur les questions de société (rôle des autorités coutumières et religieuses, pratique de l’esclavage, etc.) » dans le délai aussi court des 13 mois restants à la Transition ?
Enfin, les observateurs s’interrogent sur la capacité financière du gouvernement de Transition à opérationnaliser tous ces chantiers, tout en réussissant à organiser les prochaines élections. Cette question se pose avec acuité, dans la mesure où les partenaires techniques et financiers sont souvent réticents à accompagner financièrement un gouvernement de transition. Ils ne se limitent dans leurs appuis budgétaires qu’aux projets essentiels et aux processus électoraux. Où le Premier ministre Moctar Ouane trouvera-t-il les fonds nécessaires pour concrétiser toutes ces belles actions de son plan gouvernemental ?
Surtout que Moctar Ouane n’indique aucun chronogramme dans la réalisation de ses actions. Ce qui donne une allure de simples « belles intentions », voire de « beaux rêves » à cette forme de déclaration de politique générale, que les membres du CNT, n’ayant aucune légitimité populaire, ne pourraient pas rejeter. Ils ne peuvent pas refuser de voter la confiance au Premier ministre, qui lui-même n’est issu d’aucune majorité, dont ils seraient les porte-voix.
Boubou SIDIBE/maliweb.net